Le 14 mars 2016, un vaisseau spatial du programme ExoMars 2016, un projet de coopération à grande échelle entre l’Agence spatiale européenne et Roscosmos, a été lancé depuis le cosmodrome de Baïkonour. Il s’agit du premier des deux lancements prévus de sondes spatiales destinées à l’étude détaillée de Mars. En outre, le vaisseau spatial lancé le 14 mars n’est pas un simple explorateur lancé au hasard. L’un des principaux objectifs de la coopération russo-européenne est de trouver une source de méthane, qui prouvera l’existence de la vie sur Mars — ou de processus géologiques actifs.
Table des matières
L’essence du programme ExoMars
ExoMars est un projet d’étude à grande échelle de la planète rouge, au cours duquel les scientifiques prévoient de faire quelque chose qui n’a jamais été fait sur Mars auparavant. Il s’agit notamment de forer un puits de 2 mètres de profondeur, de rechercher d’importantes sources d’eau sur la planète et même de repérer un site d’atterrissage pour de futures missions, y compris celle du premier homme sur la planète.
Mais quel est le rôle du méthane dans tout cela ? C’est l’un des hydrocarbures fondamentaux, une classe de composés de carbone et d’hydrogène classés comme substances organiques. Le méthane est le plus simple et le plus léger de tous : sa formule est CH4ce qui signifie qu’il ne contient qu’un seul atome de carbone, un élément relativement massif. Sur Terre, le méthane est principalement produit par des organismes vivants : bactéries, plantes et animaux au cours de la vie et de la putréfaction.
Cependant, il peut également provenir de processus géologiques à l’intérieur de la planète, ainsi que d’interactions chimiques aléatoires. Sur Terre, le méthane sous forme de gaz de mine remplit souvent les mines, empoisonnant les mineurs et déclenchant des explosions. Pour la même raison, les planètes géantes gazeuses, où il n’y a pas et n’a jamais eu d’organismes vivants, contiennent du méthane dans leur atmosphère. Sur Titan, le satellite de Saturne, le méthane joue le rôle de l’eau sur Terre : des rivières de méthane y coulent, des nuages de méthane couvrent le ciel, et il pleut et neige du méthane.
Lacs de méthane sur Titan, vue d’artiste. L’appareil dans le lac est la sonde Huygens, qui fait partie de la sonde Cassini d’exploration de Saturne.
Une nuance toutefois : sur Mars, en l’absence d’une atmosphère dense, le méthane se décompose rapidement sous l’influence de la lumière ultraviolette. Or, il est présent de manière stable dans l’air martien. Il doit donc y avoir une source constante quelque part près de la surface. Il pourrait s’agir d’organismes vivants ou de processus volcaniques dans les profondeurs de la planète — ce qui serait également une découverte, car on pense aujourd’hui que les processus tectoniques de Mars se sont atténués depuis longtemps. Cette année, ExoMars a l’intention d’en découvrir la véritable raison.
Mission ExoMars 2016
Mars et la Terre sont parfois très proches l’une de l’autre
Mars 2016 est le meilleur moment pour lancer un véhicule vers Mars. En effet, Mars et la Terre ne se rapprochent le plus possible l’une de l’autre qu’une fois tous les 2 ans et 2 mois — dans cette position des planètes, il est possible de livrer une cargaison sur la planète rouge en seulement 9 mois. Cette période, appelée «fenêtre de lancement» en cosmonautique, a été utilisée pour lancer la première partie d’ExoMars.
Le porteur était une fusée russe Proton-M, qui a déjà été testée à plusieurs reprises en tant que rampe de lancement pour divers satellites. L’utilisation de Proton a permis de gagner du temps : auparavant, lorsque la NASA était impliquée dans le projet, la charge utile ExoMars devait être lancée en deux fois à l’aide de fusées Atlas-5. La fusée «Proton» a été lancée en une seule fois, bien que la distance entre Baïkonour et l’équateur de la Terre complique considérablement le processus de lancement des fusées en principe.
Ci-dessous, vous pouvez suivre la retransmission en direct du lancement depuis le cosmodrome — et plus loin, nous vous expliquerons ce qui a été lancé vers la lointaine planète Mars.
L’orbiteur de gaz à l’état de traces
En quoi consiste le kit envoyé ? Tout d’abord, il s’agit d’une station orbitale multifonctionnelle appelée Trace Gas Orbiter. Son nom parle de lui-même : elle recherchera de mystérieuses sources de méthane sur Mars. Mais ses fonctions ne s’arrêtent pas là. L’appareil comprend les modules suivants :
- NOMAD est un ensemble de spectromètres à haute extension pour tous les types de substances, capables de déterminer avec précision la composition de l’atmosphère de Mars depuis l’orbite. Ce module particulier peut identifier des sources de méthane, ainsi que de nombreuses autres substances raréfiées. Son originalité réside dans la qualité de son travail, trois fois supérieure à celle des véhicules existants. Cet instrument a été développé conjointement par des scientifiques de l’Union européenne, des États-Unis, du Royaume-Uni et du Canada.
- ACS sont des spectromètres infrarouges supplémentaires qui serviront de clé aux données de NOMAD. Comme la spectrométrie atmosphérique repose sur la lumière du Soleil et les rayons diffusés par l’atmosphère, l’orientation vers la luminosité est nécessaire pour déterminer avec précision la composition de l’atmosphère.
Les composants de TGO. Agrandir l’image.
Sonde d’atterrissage Schiaparelli
La deuxième partie d’ExoMars 2016 est la descente du module d’atterrissage test de l’atterrisseur martien, nommé d’après l’astronome italien Giovanni Schiaparelli, qui a découvert les canaux de Mars. Ce véhicule a également été développé en Russie. Contrairement à l’orbiteur, il n’a pas de charge utile, mais il permettra de mettre au point une nouvelle technologie pour l’atterrissage sur Mars.
Atterrissage du module d’atterrissage Schiaparelli
Mars n’est pas un endroit où il est facile d’atterrir — bien que sa gravité soit faible et que son atmosphère soit fine, c’est là le plus grand défi. La densité de l’air de la planète est insuffisante pour utiliser des parachutes seuls, et l’atmosphère elle-même rend le freinage par moteur aussi difficile que la précision de l’atterrissage. Schiaparelli utilisera donc un freinage agressif à l’aide de boucliers thermiques, puis manœuvrera à l’aide de parachutes et de moteurs. L’atterrissage sera extrême : lorsque le véhicule atteindra Mars, des tempêtes de poussière saisonnières y feront rage, ce qui constituera un bon test de collision pour le véhicule.
Après l’atterrissage, le module fonctionnera sur ses batteries intégrées pendant deux à huit jours, transmettant à l’orbiteur des données sur son état. Les panneaux solaires, traditionnels pour les sondes spatiales, n’ont pas été nécessaires : les tempêtes de poussière ne fourniront pas suffisamment d’énergie à Schiaparelli et il n’y a aucun intérêt à ce que le véhicule d’essai reste autonome. Toutes les recherches scientifiques prévues par le module seront effectuées pendant son vol — comme la mesure de la pression atmosphérique, de l’humidité et de la température — ou immédiatement après l’atterrissage.
Plateau méridien sur Mars (image depuis l’orbite)
Le lieu de l’atterrissage de Schiaparelli n’a d’ailleurs pas été choisi par hasard : il s’agit du plateau méridien, une vaste zone plate située juste au sud de l’équateur. On y a déjà trouvé des roches formées uniquement par de l’eau. Il est donc possible qu’il devienne le site d’atterrissage du programme ExoMars 2016.
L’avenir d’ExoMars
Les recherches et les procédures décrites ci-dessus auront lieu en octobre, dans 9 mois, lorsque la sonde atteindra Mars. Mais quelles sont les prochaines étapes pour ExoMars ?
Comme vous le savez déjà, les sondes lancées en 2016 ont pour mission principale de rechercher des gisements de méthane et d’eau et de les fixer sur la carte. Mais il est prévu d’explorer en détail les lieux découverts dans le cadre du projet ExoMars en 2018, lorsqu’un véritable rover sera livré sur Mars. Il aura l’honneur de vérifier les résultats des études orbitales.
Le dispositif du rover ExoMars
Quelle est la particularité de cet engin ? Outre les caméras panoramiques et les panneaux solaires, classiques pour les rovers martiens après le succès de Curiosity, il sera équipé d’un système de navigation autonome. À l’aide de caméras noir et blanc, l’ordinateur de l’appareil établira une carte du terrain environnant, après quoi il pourra naviguer de manière autonome jusqu’aux coordonnées fixées depuis la Terre. Même si le rover ExoMars ne parcourt ainsi que 100 mètres par jour, il s’agit déjà d’une avancée : l’autonomie des mouvements de routine du rover permettra d’économiser sur Terre le temps et l’argent qui auraient été consacrés à son contrôle direct.
La sonde Trace Gas Orbiter ne restera pas inactive. En plus de fournir des cartes précises du terrain au rover, il deviendra une station relais entre la Terre et Mars — avec son aide, davantage d’images et de données pourront être transmises à la Terre sans perte critique de qualité. Enfin, le module Schiaparelli ouvrira la voie à un atterrissage réussi du rover. Peut-être qu’à l’avenir, cette technologie fera partie intégrante de l’exploration de Mars.
Il ne reste plus qu’à attendre que les atterrisseurs martiens portent leurs premiers fruits. Mais l’attente peut aussi être prolongée — par exemple, des rumeurs indiquent que Roscosmos pourrait reporter la deuxième partie d’ExoMars de 2018 à 2020. Mais les premières grandes découvertes ont déjà eu lieu.
Date de publication: 12-26-2023
Mettre à jour la date: 12-26-2023